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Le premier pon se plaque sur le ventre de l’hélico au moment où ils descendent au ras de la Vallée. Y.T. ne l’entend pas vraiment, mais elle le sent. Elle connaît si bien ce petit bruit rassurant qu’elle est capable de le déceler avec la même finesse que les machins sismiques ultrasensibles qui enregistrent les tremblements de terre à l’autre bout de la planète. Tout de suite après, six ou sept autres pons frappent en succession rapide, et elle doit faire un effort sur elle-même pour ne pas se pencher vers le hublot. Naturellement, le flanc de l’hélico est une paroi solide de pur acier de fabrication soviétique et c’est l’idéal pour y coller un pon. À condition, bien sûr, qu’ils continuent à voler à basse altitude, ce qu’ils sont obligés de faire pour échapper aux radars de la Mafia.

Elle entend les craquements de la radio à l’avant.

— Grimpe un peu, Sacha, tu es en train de ramasser des parasites.

Elle regarde par le hublot. L’autre hélico, le petit engin d’entreprise en aluminium, vole parallèlement à eux, un peu plus haut, et tous ses occupants sont penchés aux hublots pour regarder défiler le sol sous eux. Sauf Raven, qui est toujours branché sur le Métavers.

Merde. Le pilote a compris et prend un peu d’altitude.

— C’est bon comme ça, Sacha, fait la radio. Tu les as semés. Mais il y a encore deux ou trois pons qui pendouillent sur ta coque, fais attention de ne pas les emmêler quelque part, ils sont plus solides que l’acier.

C’était le renseignement dont Y.T. avait besoin. Elle ouvre brusquement la portière et saute dans le vide.

C’est tout au moins l’impression qu’ont les occupants de l’hélico. En réalité, elle saisit une poignée au passage et reste accrochée à la portière ballante, les yeux tournés vers le ventre de l’hélico. Elle aperçoit deux pons avec leurs câbles qui pendent. Dix mètres plus bas, les poignées sont libres et oscillent dans l’air. À l’intérieur de l’hélico, elle voit Rife mais ne l’entend pas. Il est assis à côté du pilote et gesticule pour lui dire : Descends ! Pose-toi !

Elle s’en doutait. Le coup des otages, ça marche dans les deux sens. Rife ne peut se servir d’elle que si elle est en un seul morceau.

L’hélico perd de nouveau de l’altitude. Il descend vers la double bande de loglo qui marque l’emplacement de l’avenue au-dessous d’eux. Y.T. imprime à la portière un mouvement de balancement, jusqu’à ce qu’elle puisse crocher le câble de l’un des deux pons avec un pied.

Ce qu’elle va faire maintenant risque d’être terriblement douloureux, mais le tissu armé de sa combinaison devrait lui protéger plus ou moins la peau. Sans compter que la vue de Tony à plat ventre là-haut, en train d’essayer de la tirer par la manche, renforce sa tendance naturelle à ne pas trop y penser. Elle lâche la portière d’une main, attrape le câble du pon, l’enroule deux ou trois fois autour de son gant puis lâche l’autre main.

Elle n’avait pas tort. Ça fait drôlement mal. Tandis qu’elle se balance sous le ventre de l’hélico hors de portée de Tony, quelque chose fait un bruit sec à l’intérieur de sa main. Sans doute un petit os. Mais déjà le câble du pon est lové autour d’elle comme elle a vu faire Raven pour quitter le bateau en rappel avec elle. Et elle réussit quand même à contrôler sa glissade cuisante jusqu’au bout du filin.

Jusqu’à la poignée du pon, plus exactement. Elle l’accroche à sa ceinture pour ne pas tomber. Puis elle gigote pendant un bon moment, qui lui semble durer une minute entière, jusqu’à ce que le câble ne soit plus du tout embrouillé et qu’elle reste suspendue par la taille, oscillant au bout du câble, entre l’hélico et la route, ne sachant plus que faire.

Elle saisit alors la poignée à deux mains et la décroche de sa ceinture. Elle est à présent suspendue par les bras, ce qui était le but de tout cet exercice. Tandis qu’elle tourne lentement au bout du filin, elle aperçoit l’autre hélico, un peu au-dessus et sur le côté, avec tous les visages tournés vers elle. Naturellement, Rife est mis au courant de tout ce qu’elle fait par radio.

Comme elle s’y attendait, l’hélico a réduit sa vitesse et descend lentement.

Elle appuie sur un bouton et déroule entièrement le filin. Elle gagne encore six mètres. Elle est maintenant à trois ou quatre mètres de la route, qui défile sous elle à la vitesse de soixante-dix kilomètres à l’heure environ. Les logos passent comme des météores de chaque côté. Il n’y a pas beaucoup de circulation, mais elle aperçoit un groupe important de kouriers.

L’hélico marqué RARE s’approche dangereusement d’elle. Elle lève un instant les yeux et aperçoit Raven au hublot. Il a remonté ses lunettes sur son front, juste une seconde. Il a un certain regard qui indique qu’il ne lui en veut pas du tout. C’est même le grand amour.

Elle lâche la poignée et tombe en chute libre.

En même temps, elle actionne la tirette manuelle sur son revers de col et passe immédiatement en mode bibendum Michelin grâce à de petites cartouches de gaz qui explosent en différents endroits stratégiques de son corps. La plus grosse éclate comme un M-80 dans sa nuque, déployant le col de la combinaison en un coussin d’air cylindrique qui lui protège toute la tête. D’autres boudins se forment autour de sa poitrine et de son bassin. La colonne vertébrale est particulièrement bien enveloppée. Toutes ses jointures sont déjà protégées par de l’armorgel.

Ce qui ne signifie pas pour autant que la chute soit sans douleur. Elle ne voit rien, naturellement, à cause du cylindre pneumatique qui lui entoure la tête, mais elle se sent rebondir au moins dix fois. Elle entame une longue glissade sur au moins quatre cents mètres et heurte probablement plusieurs voitures dont elle entend crisser les pneus. Finalement, elle s’encadre le derrière le premier dans un pare-brise et atterrit sur le siège avant d’une voiture qui se paye la glissière de sécurité sur plusieurs mètres. Les coussins se dégonflent dès qu’il n’y a plus aucun mouvement, et elle se dégage la tête comme elle peut.

Elle a les oreilles qui sifflent ou un truc comme ça. Elle n’entend plus rien. Elle s’est peut-être pété les tympans quand les coussins d’air se sont gonflés.

Mais il y a aussi la question du gros hélico, qui a l’art de faire un boucan du diable. Elle s’extirpe de la voiture et glisse sur le capot tandis que les bouts de verre encore accrochés à sa combinaison tracent des sillons parallèles sur la carrosserie.

Le gros hélico russe de Rife est là-haut, en vol stationnaire à six mètres au-dessus de la chaussée. Lorsqu’elle lève les yeux, elle voit qu’il y a une douzaine de pons supplémentaires sur sa carlingue. En suivant les filins jusqu’à la rue, elle voit les kouriers qui s’y accrochent et qui ne semblent pas vouloir lâcher cette fois-ci.

Rife se méfie quand même, et l’hélico reprend de l’altitude. Les kouriers sont soulevés de leurs planches. Mais un semi arrive, qui déverse une petite armée de kouriers. Il doit y en avoir une centaine, ponés au malheureux poids lourd. En l’espace de quelques secondes, tous leurs Magnapons sont en l’air, et au moins la moitié se collent au blindage de l’hélico dès la première tentative. L’engin redescend jusqu’à ce que tous les kouriers touchent terre. Vingt autres arrivent à la rescousse et ponent l’hélicoptère. Ceux qui ratent s’accrochent à ceux qui tiennent bon, ajoutant leur poids à la masse qui immobilise l’appareil. Celui-ci essaie plusieurs fois de reprendre de l’altitude, mais c’est comme s’il était solidement ancré à l’asphalte.

Il commence à descendre. Les kouriers s’écartent, de sorte qu’il se pose au milieu d’un réseau concentrique de filins tendus.

Tony, le type de la sécurité, descend par la portière restée ouverte. Il s’avance lentement, enjambant les câbles, mais réussit à conserver sa dignité et son équilibre. Il s’éloigne de l’hélico jusqu’à ce qu’il ne soit plus sous le rotor puis sort un Uzi de dessous son blouson et tire une courte rafale en l’air.

— Foutez-moi le camp d’ici ! Lâchez cet hélico ! hurle-t-il.

Les kouriers, dans l’ensemble, obéissent. Ils ne sont pas stupides au point de s’entêter. Et Y.T. est libre parmi eux. Leur mission a pris fin. Le code ne joue plus, il n’y a aucune raison de continuer à harceler ces types avec leur hélico. Ils détachent leurs pons du ventre de l’engin et enroulent leurs câbles.

Tony tourne la tête et aperçoit Y.T. Elle s’avance droit sur l’hélico, d’une démarche un peu maladroite car elle est endolorie de partout.

— Remonte, salope, et estime-toi heureuse ! lui crie-t-il.

Y.T. ramasse une poignée de pon que personne ne s’est encore donné la peine de récupérer. Elle appuie sur le bouton qui coupe l’électro-aimant. La tête du pon se détache aussitôt du ventre de l’hélicoptère. Y.T. rentre le filin dans son logement jusqu’à ce qu’il ne reste plus dehors qu’une longueur d’un mètre vingt environ.

— J’ai lu un truc, une fois, sur un gus qui s’appelait Ahab, dit-elle en faisant tournoyer le pon au-dessus de sa tête. Il a enroulé son câble autour de la chose qu’il voulait poner, ce qui était une grave erreur.

Elle laisse partir le pon. Il vole en direction du rotor, dans le même plan près du centre, et elle voit le câble incassable qui commence à s’enrouler autour de l’axe délicat comme un garrot autour du cou d’une ballerine. À travers la verrière de l’hélico, elle aperçoit Sacha qui réagit, agitant frénétiquement ses manettes, relevant ses leviers, laissant échapper entre ses lèvres un flot de jurons en russe. Le manche du pon s’arrache à la main de Y.T., et elle le voit happé vers le centre comme dans un trou noir.

— À mon avis, il a eu le tort de ne pas savoir lâcher prise à temps, continue-t-elle. Ça arrive à beaucoup de gens.

Elle fait volte-face et s’éloigne de l’hélico. Derrière elle, elle entend les lourdes pièces métalliques qui font de drôles de bruits en se heurtant à grande vitesse.

Rife s’est rendu compte de la situation. Il court déjà au milieu de la route avec une mitraillette à la main, à la recherche d’une voiture à réquisitionner. Dans le ciel, l’hélico marqué RARE tourne et observe. Rife lève la tête et fait signe au pilote de s’en aller dans la direction qu’il indique.

— Va à LAX ! hurle-t-il. À LAX !

L’hélico fait un dernier passage au-dessus d’eux. Pendant ce temps, Sacha a coupé les turbines de son engin devenu inutilisable et les kouriers furieux ont désarmé Tony, Frank et le Président. Rife, au milieu de la voie de gauche, force une voiture de la Pizza CosaNostra à s’arrêter et fait descendre le conducteur. Mais Raven ne s’intéresse plus à toutes ces choses. Il observe Y.T. par le hublot. Et tandis que l’hélico s’incline en avant pour disparaître rapidement dans la nuit, il lui sourit et lève les deux pouces. Y.T. se mord la lèvre inférieure et lui montre son majeur dressé entre deux doigts pliés. Voilà qui devrait normalement mettre définitivement fin à leur relation.

Elle emprunte sa planche à un skater ébahi et s’élance vers le HTQ le plus proche où elle essaie d’appeler sa mère pour qu’elle vienne la chercher.

Le Samouraï Virtuel
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